Écrire
un poème de promenade, captation dans la peau d'un personnage qu'on
a choisi. En vers libres. Sans contrainte de temps. Litanie commençant
par le nom du personnage. Son regard à lui. La répétition installe
son hyper présence.
François d’Assise observe que le restaurant argentin de la rue du Marteau doit marcher du feu de dieu
François d’Assise observe que le restaurant argentin de la rue du Marteau doit marcher du feu de dieu
François d’Assise se
demande où sont les oiseaux
François d’Assise voit
sur la glace patiner ses sœurs les mouettes
François d’Assise a le
cœur qui se fend devant un pentagone à six côtés
François d’Assise y
voit son cœur
François d’Assise
prétend que le pentagone en forme de tête de chien est aussi en
celle d’un cœur de chien
François d’Assise
voudrait qu’il n’y ait pas qu’un grattoir, mais aussi un
heurtoir au pied des bâtiments de Horta ou autres
François d’Assise est
favorable au mariage des satyres et des mamans folles
François d’Assise est,
sur toutes les peintures de Saint-Cyr, le peintre sans peintures
François d’Assise se
sent désagréablement éclaboussé par l’Inquisition
François d’Assise
ébranle l’assise du Mannekenpis
François d’Assise ne
perd pas une ligne des journaux du prince de Ligne
François d’Assise
nourrit les perruches d’Arthur Conan Doyle
François d’Assise
entre pieds nus dans l’antre de la connaissance
François d’Assise
caresse le chien-loup
François d’Assise
marie Raymond-la-Science et François-la-Colère
François d’Assise
caresse du pied le rouge, le noir, la liberté
François d’Assise
plaque la main sur sa bouche, il a crié : « Vive
l’anarcho-communisme ! »
La
promenade du pape François
Le
pape François s’est perdu dans la ville
Le
pape François aime les pauvres et les vils
Le
pape François pérégrine, attendri.
Le
pape François aux canards compatit
Le
pape François salue le képi
Le
pape François, la couleur surgit
Le
pape François, et voici les bandits
Le
pape François, les bombes et les cris !
Le
pape François, effaré, se signe
Le
pape François effrayé s’enfuit.
Ariane
Ramaekers
Bonnie
bonne mie, dans Bruxelles Babel si belle
Bonnie
bonne mie, je talonne ton rêve rebelle
Bonnie
bonne mie, les bourgeois aux banques se collent
Bonnie
bonne mie, la propriété reste le vol
Bonnie
bonne mie, qu’est devenue l’anarchie ?
Bonnie
Parker c’est clair, elle change de caractère
Bonnie
ton affaire, échappe à l’oubli ou presque
Bonnie
bonne mie, au magasin pittoresque
Bonnie
le décrottoir à ton pied est un mouchoir
Bonnie
le trottoir pour ton rêve est un mouroir
Bonnie
t’es morte pour rien, Victor Serge tout aussi bien
Bonnie
quelle triste fin, Izozoël serait saint
Bonnie
bonne mie, dans Bruxelles Babel rebelle
Bonnie
bonne mie, je rêve à ton rêve ma belle
Rina Horowitz
Le magasin pittoresque
Jeanne
bouillonne à l’appel de ses voix
Jeanne
s’en va libérer la ville en forme de cœur devenue gueule de chien
Jeanne
cherche tous ceux qui font l’amour sacré de la patrie
Jeanne
rassemble ses troupes pour remballer l’inquisiteur
Jeanne
danse au bord du Vésuve
Jeanne
électron libre fait brûler la neige sur les étangs gelés
Jeanne
s’en fout des échafaudages et de tous les échafauds qui guettent
la bande à Bonnot
Jeanne
appelle le satyre le vieil homme au balcon et ses fleurs en plastique
Jeanne
ouvre les portes des prisons, libère Izozoël , les marins de
Kronstadt et les voleurs de pisseurs enfermés à perpèt
Jeanne
racole l’ermite de la chaussée d’Antin, le menuisier des pompes
funèbres,
Jeanne
emporte la fille aux castagnettes qui dormait dans la villa Germaine
Jeanne
casse les volets fermés des maisons à louer et remballe les chiens
des bourgeois proprio
Jeanne
cueille les feuilles d’un palmier et bande son arc
Jeanne
saute sur un cheval en croquant les bourgeons de Bruxelles rebelle
Marianne
Prévost
Wednesday
13 évite le givre, bien que l'étant.
Wednesday
13 marche sur des pavés irréguliers enserrés par du moisi.
Wednesday
13 arrive sur un parc ovale où une nymphe virginale le nargue.
Wednesday
13 est aussi désolé que les branches tordues des arbres, malgré
les bourgeons.
Wednesday
13 ricane devant la statue moussue d'un couple agenouillé tenant
leur enfant mort de la grippe espagnole.
Wednesday
13 se sent attiré comme le garou par les grottes noirs bordant
l'étang gelé.
Wednesday
13 voit une tâche sur l'asphalte en forme de chauve sourit, ce qu'il
n'est pas.
Wednesday
13 a un cœur de bétonnière.
Wednesday
13 aimerait être le satyre en bronze lutiné par la sœur de la
nymphe précédente.
Wednesday
13 flanquerait une bonne rouste à l'enfant qui veut empêcher ces
batifolages.
Wednesday
13 tague en route et en rouge ta verge gratte.
Wednesday
13 a les jambes véloces.
Wednesday
13 est la soif du canasson que l'homme voudrait désaltérer à
l'étang asséché.
Wednesday
13 pose fier altier devant la cascade gelée.
Wednesday
13 est un anarchiste à paillettes.
Wednesday
13 trace des pentacles renversés contrairement à la forme de
Bruxelles.
Wednesday
13 bave un peu.
Wednesday
13 allonge l'allure qu'il a sinistre.
Wednesday
13 déguste de gracieuses moules au restaurant.
Wednesday
13 dit comme Horta y a du métal, je mets du métal.
Wednesday
13, n'étant pas patient, accélère.
Wednesday
13 dénonce le goulag comme Victor Serge mais trop tard.
Wednesday
13 trouve que c'est la crasse, la bourgeoise.
Wednesday
13 a l'âme intensément crapuleuse.
Wednesday
13 apprécie qu'on assèche un étang pour en faire une place sous
laquelle on construit un autre écran.
Wednesday
13 s'inquiète de la longue portée de béton sans voûte, comment
tient-elle ?
Wednesday
13 est rétif à la connerie, bien que l'étant.
Wednesday
13 avance à grandes enjambées.
Wednesday
13 étant ce qu'il est te mangera un jour...
Wednesday
13 joue dans un band de louf.
Wednesday
13 regarde les bus passer, Waterloo.
Wednesday
13, n'ayant pas le sens du ridicule, aboie comme un berger allemand
rétif.
Wednesday
13 installe un décrottoir à sa porte 7 rue de l'inquisition.
Wednesday
13 te guette en haut de l'escalier avant de t'arracher la gorge.
Wednesday
13 a fait du trafic de bons du trésor rue d'Oberkampf et ça tourne
vinaigre balsamique.
Wednesday
13 isolé et désolé surtout du pied droit, - et ça, c'est normal.
Wednesday
13 se gèle le cul sur la chaise de Bonnot.
Wednesday
13 respire une abondante odeur nauséabonde si tu vois ce que je
voudrais dire.
Wednesday
13 a les gros orteils congelés, bien qu’il ne le soit pas.
Wednesday
13 s'autoprogramme pour bientôt tout donner, il voudrait pas finir
tel un satyre frigide.
Wednesday
13 devient brume bien que ne l'étant pas.
Camille
Philibert
Édith
Piaf chante les flocons.
Édith
Piaf pense à Marcel et à la danseuse aux castagnettes.
Édith
Piaf ramasserait quelques sous dessous l’oriel dodu de la riche
maison.
Édith Piaf pleure à l’accordéon la mort de Raymond la Science.
Édith
Piaf a froid, si froid.
Édith
Piaf a le nez gelé, les pieds gelés, le bout des seins gelés.
Édith
Piaf a froid, si froid.
Édith
Piaf rêve, s’évade, n’est plus là, n’est plus ici.
Édith
Piaf fume sur le trottoir, en chantant François Béranger pour les
badauds qui lui lancent une piécette.
Édith
Piaf a faim. Froid.
Édith
Piaf connaît ça par cœur.
Édith
Piaf chante. Pleure. Et fume.
Mar
Bikx
J’ai choisi le
personnage de fiction Mma Ramotswe des romans d’Alexander
McCall Smith qui se déroulent au Botswana.
Mma
Ramotswe découvre Bruxelles
Mma
Ramotswe, elle vient du Botswana
Mma
Ramotswe n’avait jamais vu l’Europe, n’avait jamais connu la
neige
Mma
Ramotswe marche dans le froid qui l’assaille
Mma
Ramotswe, dans les rues de Saint-Josse-ten-Noode, est très loin de
Gabarone
Mma
Ramotswe se demande comment elle pourrait mener ses enquêtes dans
ces maisons hautes, étroites et collées les unes aux autres
Mma
Ramotswe les trouve belles ces maisons, mais froides
Mma
Ramotswe croit reconnaître les pique-bœufs sur la glace de l’étang
gelé
Mma
Ramotswe admire la statue du cheval qui boit l’eau
Mma
Ramotswe se demande où sont les autres animaux, les vrais
Mma
Ramotswe est un peu choquée par cette statue d’humain aux pieds de
chèvre
Mma
Ramotswe pense que ce n’est pas correct de montrer ça aux enfants
Mma
Ramotswe se dépêche d’avancer pour échapper au vent piquant
Mma
Ramotswe est contente d’arriver à la maison qui l’accueille, 7
rue de l’Inquisition
Mma
Ramotswe a toujours aimé les magasins pittoresques mais préfère
ceux qui vendent des chaussures confortables parce que ses pieds la
font souffrir
Mma
Ramotswe, qui est corpulence « traditionnelle », se
faufile avec difficulté dans le labyrinthe de Jean-Pierre
Mma
Ramotswe se demande pourquoi conserver tant de papier mais se délecte
de tous les indices qu’elle y découvre
Mma
Ramotswe aime apprendre ces choses un peu curieuses sur ce pays bien
plus petit que le Botswana
Mma
Ramotswe se demande qui est cette Monique Philar dont on parle
Mma
Ramotswe s’étonne qu’on puisse choisir son roi mais admet que
les coutumes d’autres tribus soient différentes de celles qu’elle
connaît
Mma
Ramotswe trouve Jean-Pierre sympathique et aimerait l’accompagner
au marché dont il parle car elle aime aller au marché
Mma
Ramotswe, ça lui manque le ciel clair et immense du Botswana, sous
la cloche pesante des nuages de Belgique
Suzanne
Fuks
Personnage élu
Raymond Queneau je marche et ne cours
pas les rues
Queneau tu as ravivé l’Amphionie qui
comme chacun sait est ton parcours, Amphion à travers la ville
Raymond, une antiopée 25 siècles plus
tard
RQ le Prince de Ligne est sur la bande
postale
Q Le Vrai Libéral
Queneau Raymond le courrier des
lecteurs court les rues
R les gazettes sont dans des meubles de
dentiste
QR le fantôme de l’Opéra avait un
crâne
Oh Raymond ! l’Église syriaque
honore Saint Izozoël !
Oh Queneau , Hubert Krains, chantre de
la Hesbaye a vécu ici
Oh Raymond Queneau le mot Hesbaye se
trouve-t-il dans l’Encyclopédie de la Pléiade (49 volumes)
Oh Queneau Raymond nous croisons la rue
Louis Scutenairestraat, qui donne (quoi ?) dans la rue Marcel
Mariënstraat
Oh R qui vous dédicaça Quand l’acier
fut rompu, avec un plagiat filial de votre style
Ah Queneau un cadeau rimé Un
cheval vaut
Des chevaux valent
À Q saviez-vous que la Bande à Bonnot
était végétarienne ?
A Q : c’est quoi le 6 avril ?
c’est le premier Pâques sur l’Ile de Pâques
Raymond Queneau : dans mon agenda
« relire Courir les rues »
Jean-Michel Pochet
Le
magasin pittoresque
Poème
promenade
Renard
le goupil, s’est faufilé dans un groupe d’humains partis
élucider les mystères du passé, ce jour-là.
Renard
le goupil a repéré la banque chinoise du coin de la rue. Chouette
s’est-il dit, un beau coup à tenter.
Renard
le goupil a, plus loin, batifolé dans la neige. Il a marqué de ses
pattes le chemin d’art nouveau : un bow window par-ci, un puits de
lumière par là, un bout de fer par-ci, un coup de fouet par-là.
Renard
le goupil, fasciné par le cheval de Meunier, a soupiré d’aise,
devant le mouvement du piédestal-abreuvoir et du cavalier perché
sur sa noble bête.
Renard
le goupil a poursuivi, pressé d’atteindre l’antre de
l’archiviste de la rue de l’Inquisition. En passant, il a croqué
quelques bébés dodus eurocrates de la crèche de la rue
Palmerston.
Renard
le goupil est arrivé le premier, rue de l’inquisition. Un
chien-loup lui a fait peur,” il est gentil, il ne mord pas”, lui
a-t-on dit. Il est entré. Hélas ! Point d’odeur enivrante d’encres
ou de vieux papiers.
Renard
le goupil, enfin assis, a tenté de comprendre l’histoire des
humains de XIXe siècle, la ligne des princes, les fanfares
anarchistes, les faits-divers oranges, les bandes et les
contrebandes, les disques en cire à une ou deux faces.
Renard
toujours goupil est devenu un temps, membre de la bande à Bono, mais
bien vite,
Renard
le goupil, a choisi de rester neutre. Il avait à faire en sortant -
la banque - et ne tenait pas à se retrouver prisonnier de l’histoire.
Michelle
Poznantek
Poème de promenade
Blanche-Neige
s’est promenée tandis que son homonyme multiplié tombait sur sa
chevelure noire de jais.
Blanche-Neige
tenait troussée sa jupe jaune pour ne pas la tacher.
Blanche-Neige
fut choquée de voir une femme nue trôner au bord d’un lac gelé.
Blanche-Neige
est heureuse.
Blanche-Neige
marche.
Blanche-Neige
pense mais.
Blanche-Neige
est interpellée par un talus tout encrassé de déchets ménagers.
Blanche-Neige
dit Prof.
Blanche-Neige
dit Joyeux.
Blanche-Neige
dit Simplet.
Blanche-Neige
dit Et les autres, venez !
Blanche-Neige
emprunte un chemin glissant non sans retenue mais mue par sa célèbre
volonté de nettoyer.
Blanche-Neige
glisse.
Blanche-Neige,
quel malheur !
Blanche-Neige,
tes nains ne sont pas là pour t’aider.
Blanche-Neige,
tu es si sale.
Blanche-Neige,
tu es si laide quand tu pleures.
Blanche-Neige,
redresse-toi, un cavalier aux bras inégaux te regarde de haut.
Blanche-Neige,
est-ce lui ?
Blanche-Neige,
dis-nous. Que te dicte ton ventre ?
Blanche-Neige,
est-ce lui ?
Blanche-Neige,
tu t’empourpres !
Blanche-Neige,
tu joues des castagnettes et ton prince, de sa main gauche, repousse
Prof, enfin arrivé.
Blanche-Neige,
tu dessines un pénis sur la porte d’une maison ?
Blanche-Neige
écrit Pute sur un appui de fenêtre !
Blanche-Neige,
que t’a-t-il fait cet homme ?
Blanche-Neige,
tu dis ? Il a volé Manneken-Pis ?
Blanche-Neige,
combien lui a proposé le collectionneur pour cette pièce unique ?
Blanche-Neige
dit il a dit J’achète.
Laurence
Magnée
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